27.3.10

in the water, i am beautiful.
court extrait d'un work in progress.


[...] J’te fais dos parce que je m’étais juré de ne jamais pleurer devant toi, mais je sens tout de même ton dos se recourber, accabler par la lourdeur de ma soudaine peine. J’attends, je laisse aller les larmes, c’est rare, mais je me permets ce soir, parce que je connais malgré moi la suite des événements. En avant on annonce une pause. Tu te retournes, moi aussi. «Qu’est-ce qui se passe?» que t’oses demander d’une voix basse. Je te demande d’une voix faible qui ne me ressemble pas de me suivre, y’a des mots qui doivent se dire à l’abri des autres qui en savent déjà trop. À notre sortie le couloir se rétrécit sur notre passage, je me demande combien de pas il faudra franchir encore avant d’être seuls, une idée utopique entre les murs de cette université que nous abandonnons assez rapidement. On se fait face. Je m’accote sur le mur en espérant m’y fondre, passer de l’autre côté, où notre tempête a fini de souffler. Je te laisse commencer la discussion en souhaitant ma surdité. Tes mots éclatent, explosent, se fracassent à ma cage thoracique, passent au travers et atteignent le morceau de chair qui me sert de coeur avec une force insoupçonnée. Il fallait s’y attaquer pour qu’il se défende en prenant conscience de tout l’amour qu’il contient pour toi. Ça m’a fait mal en-dedans. C’était trop fort ça donnait des coups, des cris se mêlaient à mes larmes et dans tout ce fouillis j’essayais tant bien que mal de t’écouter me dire d’un ton trop calme ces mots d’abandon que je ne voulais jamais entendre sortir d’entre tes lèvres. Et en ce qui a dû durer quelques secondes, je suis devenue femme. Une vraie. Comme s’il fallait briser une fille pour qu’elle se reconstruise en femme. Le principe d’un papillon. Trop petite dans mon nouveau corps de femme, je ne savais plus quoi dire pour retenir même une infime partie de toi. Déjà effrayée par la prochaine solitude, par mon lit trop grand, il me fallait tout tenter même si je savais déjà que le mal qui t’assaille avait gagné. Je le savais parce qu’il était en train de gagner sur moi depuis quelques semaines déjà. Mais je n’étais pas prête à abandonner le combat. Tu m’as fait déclarer forfait au moment où je m’armais de courage et d’amour pour lui mener rude bataille. Je me suis écroulée. T’es parti en me laissant avec deux amies qui ont tenté de m’aimer de leur mieux pour panser mon coeur transpercé pour la première fois. L’eau que mon corps contenait s’est vidé dans le creux de leurs épaules bien plus frêles que les tiennes. [...]


J'crois que ça s'appelera «Éclats»


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